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Subject: [cspcl] La guerre de      conque^te qui frappe les campagnes
    mexicaines

LA GUERRE DE CONQUE^TE QUI FRAPPE LES CAMPAGNES MEXICAINES

Cinq sie`cles plus tard... une nouvelle mise a` sac

Mars 2007.

Avant toute chose, permettez-moi de commencer cet expose' en remerciant les
compa~eros et les compa~eras du Centre d'analyse politique et de
recherches sociales et e'conomiques (plus connus par les zapatistes sous le
nom de "CAPISE") et a` tous ceux qui rendu possible l'organisation de cette
table ronde – table ronde qui est, qui l'eu^t cru, carre'e (ou
rectangulaire, selon le cas ou la chose, c'est selon). Nous remercions
e'galement le CIDECI et le docteur Raymundo Sa'nchez Barraza de son
habituelle hospitalite' dans ces locaux qu'ils parviennent contre vents et
mare'es a` maintenir en activite', comme alternative e'ducative et e'cologique.

En tant qu'EZLN, nous avons e'te' invite's a` cette sorte de nouveau de'part de
la deuxie`me e'tape de notre participation directe a` l'Autre Campagne pour
prendre part aux de'bats sur le the`me "la guerre de conque^te qui frappe les
campagnes mexicaines".

Pour mieux comprendre notre position en cette matie`re, il faut d'abord
e'voquer...

Quelques re'flexions pre'alables :

A. Sur la guerre ne'olibe'rale

1. Dans l'un de ces textes qui permettent aux zapatistes de dire "de'sole'
d'avoir a` vous dire que je vous l'avais dit, mais je vous l'avais bien
dit" et intitule' "Sept pie`ces du puzzle mondial", e'crit il y a biento^t
sept ans (juin 1997), nous avions de'crit dans les grandes lignes le chemin
que suivrait, et suit, le capitalisme dans sa phase actuelle. A` l'e'poque,
nous l'avions de'fini comme un sentier de la guerre, de guerre de conque^te,
une guerre mondiale, la quatrie`me, totalement totale. Une guerre qui
de'passait toutes les autres en brutalite' mais qui renouait cependant avec
la conduite d'une guerre de conque^te classique : de'truire et de'peupler
pour ensuite reconstruire et repeupler.

2. La phase dans laquelle se trouve actuellement le capitalisme est, au
sens strict, une nouvelle guerre de conque^te. La Quatrie`me Guerre
mondiale, une guerre en tout lieu, a` tout instant, sous toutes les formes.
La plus mondiale des guerres. Le monde se trouve ainsi rede'couvert mille
et une fois, a` tout bout de champ, chaque fois que le nouveau dieu, le
marche', transforme en marchandise des biens autrefois ne'glige's ou qui
demeuraient hors du circuit mercantile.

3. De sorte que l'eau, l'air, la terre, les biens que contient le
sous-sol, les codes ge'ne'tiques et toutes ces "choses" qui e'taient
auparavant inconnues ou qui n'avaient aucune valeur d'usage et d'e'change
ont e'te' transforme's, au cours des vertigineuses dernie`res anne'es, en
marchandise.

Un bon exemple pour illustrer ces propos, ce sont les nappes phre'atiques
et les sources que les indige`nes zapatistes essaient de prote'ger dans le
campement qu'ils ont installe' sur la colline de Huitepec, dans les
montagnes du Sud-Est mexicain. Une entreprise multinationale qui met en
bouteille une boisson de cola rafrai^chissante bien connue (je demande
votre attention), extrait du liquide de ses sources et nappes phre'atiques,
et le transforme en marchandise.

En e'change des grands profits que cette compagnie en obtient,
l'orgueilleuse et superbe Jovel ne rec,oit rien d'autre que la saturation
de son paysage par l'irritant drapeau bicolore rouge et blanc du logotype
de l'entreprise en question, ondulant fie`rement au vent.

4. La marchandise qui reste inchange'e en de'pit des bouleversements et des
progre`s technologiques et informatiques, c'est la force de travail : les
travailleuses et les travailleurs de la campagne et de la ville. Le songe
capitaliste d'un monde sans travailleurs, uniquement avec des robots et
des machines qui ne vont pas exiger leurs droits ni se syndicaliser ni
faire gre`ve, n'est que cela : un songe. Un autre monde sera possible, mais
sur le cadavre du capitalisme comme syste`me dominant.

5. La mondialisation du capital a aboli les frontie`res nationales et
re'ame'nage' le monde. C'est maintenant la logique du marche' qui de'termine
les relations internationales et les relations a` l'inte'rieur des
E'tats-nations moribonds.

6. Sous une apparence innocente, la logique du marche' cache la logique de
l'exploitation, de la spoliation, de la re'pression et du me'pris,
c'est-a`-dire la logique du capitalisme. En dehors des doux re^ves que
chantait Chava Flores, c'est-a`-dire a` part la loterie nationale, le
"melate" et autres friandises, il n'existe pas de richesse propre et
innocente dans ce syste`me. La richesse capitaliste repose sur le vol et
sur l'exploitation.

7. La re'volution technologique et informatique entrai^nait avec elle la
possibilite' de la simultane'ite' et de l'omnipre'sence du capital,
essentiellement de son secteur le plus repre'sentatif : le capital
financier.

8. Dans la Mondialisation e'conomique capitaliste, autrement dit, dans la
Quatrie`me Guerre mondiale, "l'ennemi" est la plane`te elle-me^me. Non
seulement la plupart de ses habitants, mais aussi tout ce qu'elle contient
: la nature. Ne vous e'tonnez pas que cela ressemble a` s'y me'prendre a` un
but marque' contre son propre camp, la stupidite' est la dame de compagnie
de la convoitise capitaliste. Dans cette guerre, la "nation" qui est
l'agresseur est multinationale ou, comme diraient les classiques,
transnationale.

9. L'impe'rialisme peut fort bien avoir change' de fac,on de faire la guerre,
mais son mai^tre continue d'e^tre le capital, et son empereur nomme' a` vie,
le capital financier, poursuit sa politique de came'le'on dans la Bourse des
valeurs.

La liste publie'e dans le magazine "Forbes" e'gre`ne les noms des personnes
cense'es e^tre les plus riches de la plane`te, mais elle oublie
syste'matiquement de nommer ce que nous avons appele' "La Socie'te' du
Pouvoir", un petit groupe de patrons d'industries, de commerces, de
banques et d'entreprise de tourisme.

Ainsi les Bill Gates et Carlos Slim, pour ne nommer qu'eux, croient qu'ils
sont parmi les plus riches de ce monde et la "Socie'te' du Pouvoir" fait
mine d'y croire aussi. Pendant ce temps-la`, 53 compagnies qui ont leur
sie`ge aux USA ont obtenu, il y a sept ans, 40 % des gains au niveau
mondial. Ces entreprises ame'ricaines, ainsi que d'autres base'es en
Allemagne, en Core'e du Sud, en France, en Italie, au Japon, aux Pays-Bas,
au Royaume-Uni et en Suisse, ont obtenu a` elles seules 90 % des profits
mondiaux. 193 compagnies qui ont leur sie`ge social dans ces divers pays
ont gagne' plus de 225 milliards de dollars sur les 250 milliards
constituant les profits mondiaux en 1997.

Monsieur "Coca-Cola" n'existe pas, aussi ne figure-t-il pas sur la liste
des personnes les plus riches. Pas plus que Monsieur "Wall Mart", Monsieur
"Ford", Monsieur "Chrysler", Monsieur "General Motors", Monsieur "HSBC",
Monsieur "Santander", Monsieur "Monsanto", etc.

10. Le territoire qui appartenait au camp socialiste ayant e'te' "conquis"
lors de la Troisie`me Guerre mondiale, le capitalisme tourne ses serres
pleines de sang vers les pays pauvres qui regorgent d'abondantes
ressources naturelles : Afrique, Ame'rique latine, Asie et Moyen-Orient.
Ces re'gions du monde se sont spe'cialise'es dans la production des deux
choses, a` savoir : la possession d'abondantes ressources naturelles et une
de'sormais le'gendaire tre`s grosse production de pauvres.

11. Les peuples originels a` l'e'chelle mondiale (ce qui repre'sente plus de
300 millions de personnes) vivent dans des zones recelant 60 % des
ressources naturelles de notre plane`te. La reconque^te de ces territoires
est l'un des objectifs principaux de la guerre capitaliste.

12. L'Ame'rique latine est d'ores et de'ja` l'un des nouveaux the'a^tres de
cette guerre de conque^te, ce qui fait que les peuples indiens d'Ame'rique
joueront, comme il y a cinq cents ans, un ro^le primordial dans la
re'sistance. Mais la bataille qu'ils livrent s'ache`vera par une de'faite
de'finitive s'ils ne s'allient pas avec les travailleurs des campagnes et
des villes, ainsi qu'avec ces nouveaux sujets qui ont leur propre
identite', c'est-a`-dire qui sont diffe'rents : les femmes, les jeunes et les
"autres amours". Ces trois secteurs de la socie'te', bien qu'ils puissent
e^tre et sont incorpore's a` une classe, posse`dent pourtant leur identite'
propre, diffe'rentes de celle des autres, et construisent bien souvent leur
propre identite', mais pas toujours, dans la culture.

B. Sur la politique d'en haut dans le cadre de la mondialisation

1. Dans cette guerre de conque^te, les corps expe'ditionnaires pre'sents dans
la plupart des pays d'Ame'rique latine sont leur propre gouvernement et la
classe politique. A` l'exception de Cuba, de la croissante re'bellion du
Venezuela et de la spe'cificite' encore a` de'finir de la Bolivie, les
gouvernements des pays de l'Ame'rique latine se sont tous convertis, toutes
ide'ologies confondues, en capitaines de reconque^te des territoires qui
avaient vu s'e'panouir les civilisations des peuples originels de ces
terres.

2. Les gouvernements nationaux ne sont aujourd'hui manifestement rien de
plus que de simples ge'rants aux ordres de leur patron. Or un ge'rant, c'est
avant tout un contremai^tre.

3. Le marche' national a` l'agonie, avec lui agonise aussi tout ce qu'il
colportait : la classe politique traditionnelle, la classe moyenne, la
pense'e critique, le corporatisme, les grandes centrales syndicales
ouvrie`res et paysannes, l'autonomie relative des institutions e'ducatives,
de la recherche scientifique, de la culture et de l'art, les liens
communautaires, le tissu social, la se'curite' sociale, la se'curite' des
personnes et la de'mocratie parlementaire.

4. La de'nomme'e "classe moyenne" dont l'e'panouissement alla de pair avec
les E'tats-nations et qui devint son pilier social, ide'ologique et
politique, est aujourd'hui totalement de'sempare'e (au Mexique, du moins)
et, malgre' ses aspirations a` un changement paisible qui lui redonne sa
prospe'rite' et sa tranquillite', elle assiste avec de'sespoir a` une
destruction qui s'e'tend a` son ancienne forteresse et tour d'ivoire, la
famille.

5. E'tant donne' les logiques actuelles qui pre'sident aux travaux
politiques, la`-haut, il n'y a rien a` faire. L'enthousiasme de certains
secteurs plus ou moins e'claire's qui parient sur un "changement sans
rupture" est voue' a` l'e'chec et a` souffrir plus d'une cruelle de'sillusion
et crise de conscience.

6. Le chemin de la Liberte' n'est pas une autoroute a` pe'age sur laquelle
circuleraient les "masses" mene'es par une e'lite de dirigeants et
d'illumine's. Non, le chemin qui nous rendra libres n'est me^me pas encore
trace'. Il est construit par les sans-noms et les sans-visages qui
explorent avec leurs luttes toutes les voies jusqu'a` ce qu'ils arrivent la`
ou` ils veulent en arriver.

C. Sur les moyens de communication

1. Si auparavant l'arme'e, la police, le bataillon Olympia, les "Faucons"
ou les gardes blanches incarnaient les inhibiteurs de la lutte
de'mocratique et sociale, aujourd'hui ce sont les grands moyens de
communication informatise's.

2. Les mass-me'dias sont en me^me temps ministe`re public, jury artistique,
chaire flamboyante pas toujours lai:que, cabinet extra-officiel, police
ple'nipotentiaire, juge expert a` condamner ceux d'en bas et a` absoudre ceux
d'en haut… Oh ! Et puis, parfois ils sont me^me amusants.

3. "Wag the dog*" est une expression propre a` la langue anglaise qui
signifie quelque chose comme "remuer le chien par la queue" (restez
attentifs, s'il vous plai^t, sinon c'est incompre'hensible). C'est la
supre^me aptitude a` la manipulation me'diatique. Actualite's, tables rondes
d'experts, commentaires et colonnes des rubriques politiques ont tous pour
objectif de "remuer le chien par la queue", c'est-a`-dire "faire en sorte
que les choses arrivent", mais en partant d'un mensonge.

Voila` la nouvelle "habilete'" des me'dias e'lectroniques. De me^me qu'ils font
"disparai^tre" des re'alite's et des mouvements en les ignorant ou en les
diffamant (des exemples re'cents : San Salvador Atenco, le mouvement de
l'APPO dans l'Oaxaca, la mobilisation citoyenne contre la fraude
e'lectorale du 2 juillet 2006), de me^me ils peuvent "cre'er" des simulacres
me'diatiques sans aucun fondement re'el. Autrement dit, ils cre'ent des
mythes postmodernes.

Exemples de mythes cre'e's, crus et diffuse's par les moyens de communication :

Mythes politiques : le gouvernement de Felipe Caldero'n Hinojosa est fort,
le'gitime et le'gal et veille au bien-e^tre de tous les Mexicains ; le PRD
est un parti de gauche ; le PAN est le parti du "renouveau culturel" ; le
PRI est un parti politique.

Mythes sportifs : l'e'quipe  de foot nationale du Mexique posse`de une
qualite' footballistique de niveau international ; les World Series du
base-ball gringo sont une compe'tition mondiale ; la tenue des Jaguars du
Chiapas a une belle couleur.

Mythes militaires : l'arme'e fe'de'rale existe pour prote'ger la souverainete'
nationale ; la vieille femme indige`ne qui a e'te' viole'e par les soldats
dans la Sierra de Zongolica, au Veracruz, est morte de gastrite aigue: et
non de viol ; l'arme'e combat le narcotrafic.

Mythes policiers : les attaques lance'es par le gouvernement du DF contre
le noble quartier de Tepito ont pour objectif d'en finir avec la
de'linquance et non de favoriser l'installation de centres commerciaux ; la
police empe^che les de'lits d'e^tre commis ; l'AFI combat le crime organise'.

Mythes des spectacles : Britney Spears souffre dans le programme de
de'sintoxication auquel elle s'est soumise ; RBD est un groupe de musique.

Mythes culturels : CONACULTA est une institution qui promeut la culture et
les arts ; le Congre`s de l'Union mexicaine est re'ellement inte'resse' a` la
promotion du cine'ma mexicain ; Sebastia'n est un sculpteur.

Mythes e'ducatifs : Elba Esther Gordillo est institutrice ; le CENEVAL
be'ne'ficie a` l'enseignement moyen et supe'rieur ; Josefina Va'zquez Mota
travaille a` l'ame'lioration de l'enseignement au Mexique.

Mythes juridiques : la justice mexicaine est honne^te, propre, impartiale
et objective ; la Constitution est la loi supre^me dans notre pays ; l'E'tat
de droit re`gne au Mexique.

Mythes e'conomiques : les privatisations sont ne'cessaires et urgentes pour
le bien de l'e'conomie nationale ; les re'formes de l'ISSSTE re'ussiront a` le
sauver ; la banque est utile a` l'e'conomie mondiale.

Mythes comiques : il existe une diffe'rence entre les nouvelles de la
classe politique et les vignettes comiques des journaux.

Mythes religieux : One'simo Cepeda est un e've^que catholique.

Mythes e'thiques : la position que l'on adoptera en ce qui concerne
l'avortement sera une position en faveur de la vie ou en faveur de la
mort.

Mythes historiques : Cuauhte'moc Ca'rdenas Solo'rzano a quelque chose du
ge'ne'ral La'zaro Ca'rdenas del Ri'o (en plus du patronyme, je veux dire).

Mythes de l'information : Gutie'rrez Vivo' et Jacobo Zabludovski sont des
repre'sentants de la presse libre, inde'pendante et honne^te ; "Cro'nica" est
un journal ; Joaqui'n Lo'pez Do'riga et Javier Alatorre sont des
journalistes.

Mythe sexuel : le Sup Marcos a de belles jambes... ("Quii veeeeeeeeeeeut
du riz au lait ?")

D. Sur les campagnes mexicaines

1. Dans les campagnes mexicaines, et comme l'a brillamment et brie`vement
explique' le compa~ero Rafael Alegri'a, de Vi'a Campesina au Honduras, le
monde entier connai^t un processus de destruction et de de'peuplement et,
simultane'ment, de reconstruction et de repeuplement.

2. Le compa~ero Sergio Rodri'guez Lazcano en dira plus long sur ce sujet…

(Note : suivit l'expose' de Sergio Rodri'guez Lazcano.)

3. Trois exemples illustrant ce phe'nome`ne dans trois E'tats gouverne's par
les trois principaux partis politiques mexicains :

a. E'tat de Sonora (gouverne' par le PRI), les deux photos. Cela s'est passe'
alors que nous faisions route vers le territoire du peuple mayo, dans le
Sonora. Sur le bord de la chausse'e, un gigantesque panneau publicitaire
proclamait : "Le gouvernement du Sonora tient parole : avec la cre'ation
d'emplois." Une dizaine de me`tres plus loin derrie`re le panneau gisait une
vieille usine de'cre'pite, ronge'e par la rouille.

Autre cliche'. Dans une communaute' indige`ne mayo, un des dirigeants proce`de
a` la "lecture" d'une photo parue dans "Ojarasca", supple'ment a` "La
Jornada", et nous raconte l'histoire de la spoliation dont a e'te' victime
le peuple mayo. Une histoire qui se re'pe`te en territoire des Tohono
O'Odham, des Seri ou Comc'ac, des Yaqui et des Pima.

b. E'tat de San Luis Potosi' (gouverne' par le PAN), les hauts-plateaux du
Potosi'. "Une e'chelle", disaient les Autres habitants du Potosi', en
montrant une carte ou` la ve'ge'tation s'e'chelonnait de la Huasteca jusqu'au
de'sert. "Oui, une e'chelle", avons-nous dit quand nous les avons e'coute's
raconter le de'placement de la population paysanne autochtone des
hauts-plateaux et leur remplacement par des indige`nes de la Huasteca, du
Puebla et du Veracruz. On ne s'est pas contente' de changer la composition
ethnique des habitants, mais aussi la possession de la terre. La` ou` il y
avait auparavant des ejidos, maintenant il y a des latifundia. La` ou` il y
avait auparavant des commissaires des biens de l'ejido, maintenant il y a
des contremai^tres. La` ou` l'on produisait auparavant des aliments assurant
la subsistance des habitants, maintenant on produit des migrants pour
l'exportation.

c) E'tat de Zacatecas (gouverne' par le PRD). Dans la communaute' de La
Tesorera, une entreprise pre^te-nom appartenant a` Ricardo Monreal, chantre
de la de'mocratie membre du PRD et du FAP, qui avait cru pouvoir humilier
les habitants, s'est heurte'e a` une chose dont elle ignorait l'existence :
la dignite'. Sur place, un membre de l'Autre Zacatecas nous racontait que
dans un autre village l'e'migration des habitants d'origine avait augmente'
de manie`re significative, mais que, curieusement, le nombre d'habitants
avait fait de me^me ! Ayant fait sa petite enque^te, il a constate' que les
habitants du Zacatecas se voyaient force's d'e'migrer aux USA parce qu'on
leur o^tait leurs terres, par manque de subsides pour les paysans et a`
cause des bas salaires. Alors, des grands proprie'taires occupaient leurs
ejidos et la force de travail des habitants d'origine e'tait a` son tour
remplace'e par des contingents d'indige`nes emmene's sur place pour y
travailler comme pe'ons, comme au temps de Porfirio. Dans le Zacatecas
gouverne' par le PRD, les deux tiers de la population d'origine vivent
aujourd'hui aux USA !

Au Cerro de La Bufa, le muse'e cre'e' pour comme'morer la bataille de
Zacatecas posse`de un exemplaire d'un journal de l'e'poque, sur lequel on
peut lire que l'on ne tardera pas a` e'craser les "bandits" du ge'ne'ral
Villa. Quelques jours plus tard, les troupes de Villa s'emparaient de
Zacatecas, la capitale.

4. En examinant dans le de'tail ce qui a e'te' expose' a` peu pre`s correctement
par Joao Pedro Ste'dile, par ce ve'ritable ramasseur de la pluie de ceux
d'en bas qu'est Eduardo Galeano et par les e've^ques re'ellement catholiques
Don Pedro Casalda'liga et Don Thomas Balduino, on peut suivre les traces,
souvent simultane'es, de la guerre de conque^te des campagnes mexicaines.
De'mante`lement de la politique sociale : ni cre'dits, ni aides, ni marche'.
Nouvelles re'glementations qui abattent les "de'fenses" juridiques : re'forme
de l'article 27 de la Constitution, inflation galopante (des prix des
produits et de la consommation), prospectives de niveau de vie,
vulne'rabilite' juridique, vente ou spoliation, migration, re'ame'nagement
capitaliste du territoire, repeuplement.

5. Atenco et le FPDT, l'Oaxaca et l'APPO, le Chiapas et l'EZLN.

a. Atenco constitue un moment de'cisif dans la lutte pour la de'fense de la
terre. Le courage de ses habitants ainsi que la participation intelligente
et de'termine'e du Front des communes pour la de'fense de la terre, dont un
des dirigeants est Ignacio del Valle (qui continue a` ce jour d'e^tre
injustement emprisonne'), permit d'obtenir l'une des victoires qui ont
donne' des ailes a` la mobilisation paysanne en bas et a` gauche. Atenco, ce
n'est pas que la re'pression des 3 et 4 mai 2006, avec son corte`ge de
violations des droits humains fondamentaux et l'agression syste'matique
contre les femmes e'rige'e en politique d'E'tat. C'est aussi, et il est
indispensable de ne pas l'oublier, la lutte victorieuse contre l'ae'roport
voulu par Vicente Fox et un mouvement qui s'est affronte' a` l'alliance
forme'e par les divers gouvernements, des patrons, le clerge' et les grands
me'dias. Le peuple d'Atenco et le FPDT ont beaucoup a` apprendre a` toutes et
a` tous.

b. Le mouvement social en premie`re ligne duquel se trouve l'APPO, dans
l'Oaxaca, est lui aussi riche d'enseignements pour la lutte sociale. Me^me
si les me'dias se sont arrange's pour faire croire que ce mouvement est
reste' essentiellement limite' a` la ville d'Oaxaca, la capitale, il a
pourtant connu et connai^t encore des moments brillants dans les zones
rurales de l'E'tat d'Oaxaca, ou` les peuples indiens ont mis en e'vidence
leurs traditions de lutte et de re'sistance. Une grande lec,on enseigne'e par
le mouvement de l'APPO est son acharnement, sa capacite' de re'cupe'ration et
la constance dont il fait preuve dans la poursuite de ses objectifs.
Oaxaca, ce n'est donc pas uniquement la re'pression du 25 novembre et le
solde d'actions ille'gales et d'arbitraire qu'il a laisse', c'est aussi et
surtout l'organisation populaire autonome, sans la tutelle d'institutions
ou de partis politiques, et la de'mocratie directe applique'e dans des
circonstances tre`s difficiles.

c. Dans le Chiapas de notre douleur et de nos espoirs, les communaute's
indige`nes zapatistes de'montrent qu'un autre monde est possible. Et aussi
qu'il est possible de le construire a` partir de la culture indige`ne, de sa
conception de la terre et du territoire. "La Dignite'", c'est ainsi que
nous appelons ce mot, cette de'marche, cette manie`re de vivre, c'est-a`-dire
de lutter.

Une le'gende toute re'cente raconte que dans la pe'nombre du petit matin, au
plus profond des montagnes du Sud-Est mexicain, des hommes et des femmes a`
la peau brune n'ont le coeur habite' que d'une seule crainte, celle de ne
rien faire face a` l'injustice. "Los Vigilantes" (les veilleurs, les
vigilants), c'est le nom par lequel on de'signe ces hommes et ces femmes.
Ils constituent le noyau dur du Vota'n Zapata, gardien et coeur du peuple.
Ce sont elles et eux qui veillent sur nous et nous accompagnent. Quelqu'un
leur demande de quoi retourne toute cette histoire. Elles et eux re'pondent
: "Il s'agit d'e^tre meilleurs, de la seule fac,on dont il est possible de
devenir meilleurs : collectivement." Bien que ce ne soit qu'un murmure, la
voix des "Vigilantes" est perc,ue comme un cri quand elle ajoute : "D'e^tre
dignes, tous et toutes, c'est de cela qu'il s'agit dans cette histoire."
Et moi, j'ajoute maintenant : "Une des voies qu'emprunte la dignite' est
celle que suit Vi'a Campesina dans le monde entier."

Liberte' et Justice pour Atenco !
Liberte' et Justice pour l'Oaxaca !

Sous-commandant insurge' Marcos.
Mexique, mars 2007.


* Il existe un film du me^me nom (en anglais), interpre'te' notamment par
Robert De Niro, campant une sorte de "gorge profonde", et par Dustin
Hoffmann, dans le ro^le d'un cine'aste bien allume'. Par-la` passent toute une
ribambelle de "seconds couteaux" recrute's pour jeter un "e'cran de fume'e"
("La cortina de humo" e'tant d'ailleurs le titre du film en espagnol) sur
certain scandale sexuel d'un pre'sident ame'ricain, en... de'clenchant un
faux conflit arme', qui n'existera que sur les e'crans et que les me'dias
s'empresseront de reprendre tous en choeur. Les images de guerre sont
celles de "l'invasion" de l'i^le de la Grenade (NdT).

-- 
Traduit par A'ngel Cai'do.
Diffuse' par le Comite' de solidarite' avec les peuples du Chiapas en lutte
(CSPCL, Paris) - 33, rue des Vignoles - 75020 Paris - France
re'union (ouverte) le mercredi a` partir de 20 h 30
http://cspcl.ouvaton.org
[EMAIL PROTECTED]
liste d'information : http://listes.samizdat.net/sympa/info/cspcl_l



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