Chères et chers collègues,
l’équipe de l’Axe de recherche « Esthétique et théories critiques de la
culture » de l’École des arts de la Sorbonne, Université Paris 1 Panthéon
Sorbonne, Institut ACTE-EA7539 a le plaisir de vous annoncer la tenue du
Colloque International « Objets Vivants » qui aura lieu les 18 et 20
novembre 2021.

Vous trouverez ci-après le programme et l’argument du Colloque
(malheureusement cette liste n'accepte pas des PJ et le texte est en état
brut). N’hésitez pas à les faire circuler.

Bien cordialement,
Neli Dobreva


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OBJETS VIVANTS
Colloque international 18 et 20 novembre 2021
Université Paris 1 Panthéon Sorbonne, Institut ACTE – École des arts de la
Sorbonne
Deux journées :
Jeudi 18 novembre
Vivant ou non-vivant / At the Margins of Life

Samedi 20 novembre
Formes de vie et autonomie du non-vivant/
Forms of Life and Autonomy of Nonliving Things

Cité Internationale Universitaire de Paris
Maison du Portugal – 7 P, boulevard JOURDAN, 75014, Paris
RER B, Cité universitaire

OBJETS VIVANTS, 1
Vivant ou non-vivant / At the Margins of Life

Jeudi 18 novembre 2021
Cité Internationale Universitaire de Paris
Maison du Portugal – 7 P, boulevard JOURDAN, 75014, Paris
RER B, Cité universitaire

9h00-9h20 – mot de bienvenue, Aline Caillet/ Jacinto Lageira, au nom de
l’institut ACTE (Paris 1)
Ouverture et présentation de la journée par la coordinatrice Rahma Khazam
(Paris 1)
9h20-11h « Objet Vivant » : Table ronde conçue et animée par Jean-Luc
Bichaud, artiste-plasticien, avec la
participation des artistes Céline Cléron, Jacques Vieille, Abraham
Poincheval, Nicolas Darrot
11h00-11h30 Barbara Formis (Paris 1), Gestes Vivants
11h30-12h00 pause café
12h00-13h00 Séance plénière : Charles Wolfe (Université de Toulouse), Le
corps matérialiste,
13h00-14h00 pause déjeuner
14h présentation de l’après-midi par Rahma Khazam (Paris 1)
14h-16h15 Humain, Post-humain, Inhumain
Ludovic Duhem (École Supérieure d’Art et de Design de Valenciennes),
Technoesthétique des mutants.
Artificialisation du vivant et naturalisation de l'artificiel,
Anna Szyjkowska-Piotrowska (Académie des beaux-arts de Varsovie),
Métamorphose à l'époque de
l'anthropocène – entre objet et animal
pause
Camille Chamois (Université Libre de Bruxelles), Perspectivismes,
panpsychismes et panexpérientialismes :
quelle place pour le vivant ?
Malgorzata Grygielewicz (École européenne supérieure de l’image), « Second
life » ou la seconde mort ?
Table ronde : Humain, Post-humain, Inhumain, avec Ludovic Duhem, Anna
Szyjkowska-Piotrowska, Camille
Chamois, Malgorzata Grygielewicz
16h15-16h30 pause café
16h30-18h30 La nature : histoire et actualité d’un concept / Nature Then
and Now (in English)
Monika Bakke (Adam Mickiewicz University Poznan), Lithic corporality:
Crystallizations on the edge of life
Steven Shaviro (Wayne State University, Detroit), Nature Green in Tooth and
Claw : Reflections on plant
sentience
Jessica Riskin (Stanford University), Lamarck's Giraffe, A Political History
Round table: Nature Then and Now, with Monika Bakke, Steven Shaviro,
Jessica Riskin
18h30-18h45 : Conclusion/discussion

OBJETS VIVANTS, 2
Formes de vie et autonomie du non-vivant/
Forms of Life and Autonomy of Nonliving Things

Samedi 20 novembre 2021
Cité Internationale Universitaire de Paris
Maison du Portugal – 7 P, boulevard JOURDAN, 75014, Paris
RER B, Cité universitaire

9h00-9h15 – mot de bienvenue, Aline Caillet/ Jacinto Lageira, au nom de
l’institut ACTE (Paris 1)
Ouverture et présentation de la journée par la coordinatrice Neli Dobreva
(Paris 1)
9h15-10h45 Céline Lafontaine (Université de Montréal), Bio-objets :
Repenser les frontières du vivant par delà
le non-humain, Tiphaine Calmettes (artiste, Centre d’art contemporain
d’Ivry – Crédac/ Laboratoires
d’Aubervilliers), Agentivité et vie des formes, Sarah Matia Pasqualetti
(Paris 1), L’agentivité non-humaine de
l’oeuvre d’art, vers une esthétique de la matière-énergie, Modération:
Jacinto Lageira
10h45-11h00 pause café
11h00-12h00 Séance plénière : Jean-Michel Durafour (Université
Aix-Marseille), Cinéma : images animées, desseins animaux
12h00-13h15 pause déjeuner
13h15-14h45 Emmanuel Picavet (Paris 1)/ Mara Magda Maftei (Paris 10/
CEM-FMSH), La vie individuelle et
les systèmes non-vivants : quel éclairage la fiction peut-elle apporter ?
Marina Velez (artiste, Cambridge School
of Art), The object as extended organ: affective cartographies for
cognising the environment, Modération : Céline Lafontaine
14h45-15h00 pause
15h00-16h30 Gilbert Lechermeier (ingénieur, IHPST, Paris 1/ CNRS), Entre
rupture et continuité : saisir
l’originalité du vivant, Lorraine Verner (École des Beaux-Arts de
Versailles), Les flux tendus d’Edith Dekyndt,
Emanuele Quinz (Paris 8, EnsadLab), Objets à comportements, Modération :
Mara Magda Maftei
16h30-16h45 pause café
16h45-17h45 Perig Pitrou (CNRS-Collège de France/ PSL), Organismes &
Artefacts, Quentin Hiernaux
(EHESS/ ULB), Réification et technicisation du végétal, Modération : Neli
Dobreva
17h45-18h00 pause
18h00-18h45 Séance plénière : Joëlle Zask (Université Aix-Marseille), De la
niche au corridor ; pour un art libéré de l’idéal symbiotique
18h45-19h00 clôture
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Objets Vivants - Argumentaire
Colloque international

Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne
École des Arts de la Sorbonne – Intitut ACTE
Direction scientifique : Neli Dobreva, Jacinto Lageira, Rahma Khazam.

Aborder à la fois la question de l’objet et du vivant dans une perspective
de la philosophie
de l’art, de l’esthétique, de l’art contemporain, de la biopolitique et de
la technologie,
nécessite tout d’abord de nous interroger sur la manière dont nous
définissons ces deux termes
et en quoi ils peuvent converger. Avec l’apparition d’objets inanimés
paraissant vivants
(robots, internet des objets), l’objet est de plus en plus en proie à des
états et des phénomènes
intermédiaires et indéterminés qui se rapprochent toujours davantage du
vivant. Quant au
vivant, il devient de plus en plus difficile de le séparer du non-vivant,
depuis que
l’intelligence artificielle a démontré leur proximité. Pouvons-nous en
conclure que l’objet
n’est plus opposé au vivant, que depuis l’avancement et la consolidation de
l’écologie, des
biotechnologies, des nouvelles technologies, etc., leur relation est une
affaire conclue ?
En réalité, la question n’est pas si simple, car en questionnant la
distinction entre l’objet
soi-disant inerte et l’être ou l’animal vivant ne questionnons-nous pas en
même temps les
divisions entre humain et non-humain, sujet et objet, intelligence
naturelle et artificielle ?
L’être pensant doit-il obligatoirement assumer la position du sujet qui
domine l’objet inerte
non-vivant ou ce rapport peut-il s’inverser ? D’ailleurs, sur quelles bases
définissons-nous le
vivant ou le sujet et l’opposons-nous à l’objet ? Sujet et objet sont-ils
voués à disparaître et se
fondre l’un dans l’autre, engloutis dans le tourbillon d’états indéterminés
qui définissent
actuellement le vivant et le non-vivant ? Ou bien le sujet et l’objet se
mettront-ils sur un pied
d’égalité de façon à conserver leur autonomie ? Se pose alors avec acuité
la question du choix
entre autonomie et absorption, entre liberté de pensée et assimilation, à
une époque où les
nouvelles technologies de l’information et de la communication envahissent
et transforment
nos vies et nos esprits au point de mettre en cause notre faculté de libre
arbitre (Žižek, 2020).
Si ces interrogations quant aux termes vivant/non-vivant, sujet/objet sont
au coeur même de
la philosophie contemporaine (nouveau matérialisme, réalisme spéculatif et
dérivés), elles
n’en sont pas moins vivement débattues : tout est-il relié à tout, comme le
soutiennent certains
adeptes du nouveau matérialisme, prônant une « relationnalité » tous
azimuts ? Que penser de
la théorie de Karen Barad (2007) selon laquelle l’objet n’a pas une
existence indépendante,
mais est profondément imbriqué avec le sujet ? On peut y opposer le
réalisme spéculatif ou
l’ontologie orientée objet – selon cette dernière (Harman 2011), le terme «
objet » englobe
aussi bien les sujets que les objets, et chaque objet est autonome,
inaccessible et « non
relationnel », qu’il soit vivant ou non-vivant. Notre investigation s’étend
également à des
théories plus récentes concernant le vivant et/ou l’objet, quel que soit le
parti pris
philosophique qu’elles représentent.
Les interrogations concernant le vivant sont en passe de devenir tout aussi
importantes
dans d’autres champs de recherche et disciplines. En matière de
technologie, l’étude des
rapports humain-machine, et notamment la créativité de l’intelligence
artificielle et ses
capacités d’interaction avec l’humain constituent une question essentielle.
Quant à la
biopolitique, elle se définit dans le sillage de Foucault comme
l’intégration du vivant dans la
politique, ou plus précisément, comme « l’ancrage des technologies
libérales de
gouvernement dans les propriétés biologiques des sujets » (Bossy, Briatte,
2011). Nous
pouvons également mobiliser le concept de zôê repris par Agamben, qui
semble intéressant
quant à la distinction zôê (le simple fait de vivre) vs. bios (la façon de
vivre caractérisant un
individu ou un groupe) (Agamben, 1997). Remettant en cause de telles
séparations, le
Manifeste convivialiste appelle à la création de nouveaux récits en
symbiose avec nos vies
contemporaines, convoquant ainsi une forme de résistance, ou encore de
résonance (Hartmut
Rosa, Nathanaël Wallenhorst), qui pourrait sortir le vivant de la crise de
l’imaginaire et du
pouvoir.
La notion du vivant a aussi une longue histoire : nous nous bornerons ici à
évoquer les
premiers naturalistes, qui isolaient « des corps vivants » (Lamarck, 1802),
ou travaillaient sur
l’inventaire et l’origine des espèces (Darwin, 1859), ainsi que les
biologistes introduisant sur
la scène de la connaissance le terme d’« écologie » au sens d’interaction
avec le milieu, vivant
ou non-vivant. Ces notions interviennent aussi dans les premiers pas de la
littérature
dis/utopique d’hybridation entre vivant/ non-vivant et artificiel (Mary
Shelley, 1818 ; Ian
McEwan, Machines Like Me, 2019) et dans les premiers essais en « biologie
synthétique »
faisant entrer le végétal en relation avec la science et la technique.
Aujourd’hui, les analogies
et convergences entre le vivant, le non-vivant et les technologies de
pointe se produisent,
toutes disciplines confondues, depuis l’apparition du terme d’anthropocène
en écologie
(Stoermer, 1980) et plus tard en chimie (Crutzen, 2000), jusqu’aux «
quasi-objets » de Michel
Serres (Le Parasite, 1980 ; Genèse, 1981), à la frontière entre humain et
non humain :
animalier, végétal, minéral. Pour Bruno Latour (1991), des objets tels «
une centrale
nucléaire, un trou dans la couche d’ozone, une carte du génome humain, etc.
» forment des
« quasi-objets », constituant une conception de la nature englobée par un
discours politique ou
social. Ainsi, ce sont les objets hybrides qui constituent le monde,
relevant aussi bien de la
technique et de la culture, de l’humain que du non-humain.
Quant au monde de l’art, il se met à suivre les découvertes scientifiques
quant à l’évolution
du vivant. Cela nous permet-il de décloisonner l’expérience esthétique avec
des oeuvres d’art
« hybridées » par l’expérience scientifique qui tiennent compte du végétal
ensemble avec tout
le vivant, en conservant l’objet de l’écologie et en laissant « les
corridors » (Zask, 2019) qui
relient le vivant au non-vivant ? Le vivant peut aussi devenir l’objet même
de la pratique de
certains artistes : le bio-art suit les expériences de la génétique ou de
l’intelligence artificielle
appliquées au vivant, tandis que le bio-hacking travaille en mode
participatif indépendamment
du discours scientifique dominant. Tout aussi pertinentes sont l’expérience
et l’expertise
apportées par le modèle d’une entité organique autorégulatrice,
unicellulaire, ni animal ni
plante, interagissant avec son environnement : le « blob ». Cependant ces
expériences, telles
que celles conduites par des artistes comme Eduardo Kac, Stelarc, Špela
Petrič, et bien
d’autres, ne témoignent-elles pas le plus souvent d’une « objectivation »
du vivant, sans pour
autant accorder à ces éléments vivants une quelconque autonomie ou vie
propre en dehors de
leur relation avec l’humain ?
Ce qui nous intéresse à présent est de savoir si, en dehors de cette
interdépendance vis-àvis
de l’humain, l’art pourrait exprimer et rendre sensible une autonomie de
l’« objet vivant ».
Si on suit les avancées en la matière, il s’avère qu’il existe d’autres
approches du vivant dans
le monde de l’art contemporain qui ne tentent ni « d’objectiviser » le
vivant ni de le fondre
dans le non-vivant mais lui accordent une autonomie et encouragent son
évolution (Jean-Luc
Bichaud, Jacques Vieille, Michel Blazy etc.). Comme le formule Jean-Luc
Bichaud, ces
artistes qui explorent les enjeux de signification qui se dissimulent dans
la composition
formée par les termes objet /animé / inanimé/ vivant /semi-vivant, abordent
la question d’une
« greffe » possible entre la question du vivant et celle de l’objet. Ce
faisant, il ne s’agit pas de
les fondre l’un dans l’autre, mais au contraire de mettre en avant leurs
spécificités et
différences. Quel rôle pourrait jouer dans l’esthétique contemporaine l’«
objet vivant » pris
dans ce dernier sens ? Comment le vivant et le non-vivant compris comme
autonomes l’un de
l’autre, ayant chacun leur « vie » propre, mais toutefois greffés
ensembles, juxtaposés, sur un
pied d’égalité, pourraient-ils nous émouvoir par une forme sensible se
révélant dans l’oeuvre
d’art ?
Alors la question qui se pose dans ce cas précis serait celle de savoir si
nous pourrions
saisir le vivant, voire même l’« objet vivant » de façon à prétendre
renverser, ou au moins
contester le rapport kantien à l’objet supposé produire le « beau » au
contact du sujet. Ou
s’agit-il plutôt de saisir l’objet vivant au-delà de tout intérêt ou
volonté de jugement ou
d’analyse, de façon à faire écho à la notion de plaisir désintéressé de
Kant, selon laquelle le
sujet n’impose pas ses formes sur le monde, mais se laisse façonné par
celui-ci (Shaviro,
2009) ? Autrement dit, pouvons-nous penser l’agentivité de l’objet ainsi
que son autonomie,
et quelles en sont les conséquences pour le rapport entre sujet et objet,
vivant et non-vivant ?

Références (non exhaustives) :

Agamben, Giorgio, Homo Sacer, 1997
Barad, Karen, Meeting the Universe Halfway, 2007
Bossy, Thibault, Briatte, François, « Les formes contemporaines de la
biopolitique », dans
Revue Internationale de Politique Comparée, 2011
Brayer, Marie-Ange, Zeitoun, Olivier (dir.), La fabrique du vivant, 2019
Deuxième manifeste convivialiste, 2020
Durafour, Jean-Michel, Cinéma et cristaux, Traité d’éconologie, 2018
Foucault, Michel, Dits et écrits, 2001
Harman, Graham, The Quadruple Object, 2011
Latour, Bruno, Nous n’avons jamais été modernes, 1991
Meillassoux, Quentin, Après la finitude, 2006
Serres, Michel, Genèse, 1981
Serres, Michel, Le Parasite, 1980
Shaviro, Steven, Without Criteria: Kant, Whitehead, Deleuze, and
Aesthetics, 2009
Wallenhorst, Nathanaël, L’Anthropocène décodé pour les humains, 2021
Zask, Joëlle, Quand la forêt brûle. Penser la nouvelle catastrophe
écologique, 2019
Žižek, Slavoj, Hegel in a Wired Brain, 2020

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https://www.vidal-rosset.net/mailing_list_educasupphilo.html
        
        
        
        
        
        
        
        
        
        
        
        
        

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