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de Nation Arabe. Al Faraby [mailto:[EMAIL PROTECTED]]
Irak

Entretien avec Mohamed Saleh, ministre de l'Economie et du Commerce.

« Pétrole contre nourriture équivaut à 7 dollars par mois et par individu »

Comment jugez-vous les résultats de votre visite en Egypte ?

Nous avons fait une révision complète de tous les accords bilatéraux pour les rendre plus performants. Ainsi, le volume du commerce bilatéral atteindra cette année un milliard de dollars environ, contre 20 millions en 1989. Ceci a été possible grâce à l'extension de la liste des importations. Ainsi, nous avons commencé à acheter depuis l'année dernière des matériaux de construction. Nous étudions en outre cette année plusieurs offres pour l'importation de véhicules. Il ne faut pas non plus oublier l'aspect culturel. Nous achetons des programmes et feuilletons de télévision. De même, des programmes pour accueillir des étudiants iraqiens dans les universités égyptiennes sont prévus.

Que sont devenus vos principaux partenaires commerciaux lors de l'embargo ?

Les partenaires d'aujourd'hui sont dans l'ordre, selon le volume du commerce : la France, la Russie, la Chine, l'Egypte en quatrième place, avec un milliard de dollars, suivent ensuite le Vietnam, l'Indonésie, la Malaisie et l'Inde.
En tenant compte du fait que nos importations sont limitées par l'accord « pétrole contre nourriture », nos partenaires commerciaux ont changé depuis l'embargo. Le président Saddam Hussein a souvent souligné l'importance de renforcer les liens avec les pays arabes. Ainsi, la priorité a été donnée aux produits provenant des pays arabes. Aujourd'hui, 50 % de notre commerce extérieur — importations, en fait — provient des pays arabes. Ceux-ci sont dans l'ordre, après l'Egypte, la Jordanie, la Tunisie, l'Algérie, les Emirats arabes unis, l'Arabie saoudite et le Maroc.

Est-ce que l'ordre d'importance est le même pour les investissements étrangers ?

Non. L'Iraq ne permet pas aux étrangers d'investir. Nous n'en avons pas besoin. Nous sommes riches en ressources, nous n'avons donc pas besoin de capitaux étrangers pour créer de nouvelles usines ou de nouveaux emplois. En revanche, en ce qui concerne le transfert de technologie, nous passons toujours des accords avec des spécialistes des quatre coins du monde.

Les relations avec la Syrie sont remarquablement en progrès ; une délégation iraqienne présidée par le premier ministre s'est rendue récemment à Damas. Comment jugez-vous ce rapprochement et quels ont été les résultats de la visite ?

Les relations avec nos frères syriens avancent à pas satisfaisants. Nous nous sommes récemment mis d'accord pour augmenter le volume du commerce à un milliard de dollars, contre le chiffre actuel de 450 millions. Nous avons réactivé le projet de chemin de fer qui devra relier Mossoul et Alep. Le comité mixte s'est réuni il y a un mois à Damas dans le cadre d'une visite pareille à celle que j'ai menée en Egypte, pour discuter les différents aspects de nos relations. Ainsi, plusieurs discussions ont tourné autour de projets industriels et commerciaux, ainsi que sur une coordination plus efficace entre les Chambres de commerce et d'industrie. En outre, il y a le projet d'oléoduc pour transporter le brut d'Iraq afin qu'il soit exporté depuis les ports de Syrie. Les travaux de construction à l'intérieur du territoire iraqien sont terminés et nous attendons que la partie syrienne achève les siennes. Mais la date n'a pas encore été fixée.

Comment pouvez-vous décrire la situation de l'économie iraqienne sous l'embargo ?

Malheureusement, le programme « pétrole contre nourriture » n'a jusqu'à présent pas permis de reconstruire ou rénover ce qui a été détruit de l'infrastructure iraqienne. Actuellement, le programme ne permet à l'Iraq que d'importer un certain quota de ses besoins de base, c'est-à-dire de la nourriture et un peu de médicaments. Par contre, les projets de purification de l'eau et de drainage sanitaire sont gelés à cause de l'obstination américaine et britannique. Nous avons déjà revendiqué d'allouer 2 milliards de dollars pour cet objectif, mais ils ont refusé. Et cela réduit en fin de compte l'efficacité du programme, car s'il y a un manque d'eau potable, le rendement des importations de nourriture et de médicaments se trouve très réduit. De ce fait, le taux de mortalité est toujours terriblement élevé, notamment chez les enfants. L'Iraq souffre de même de l'interdiction de plusieurs médicaments, comme ceux du traitement du cancer. Et même les contrats de rénovation et d'équipements des hôpitaux sont encore et toujours gelés, sans raison valable.

Comment les revenus des exportations pétrolières sont-ils donc distribués ?

Depuis le début du programme, l'Iraq a exporté pour 32,5 milliards de dollars de brut. L'Onu a pris un tiers, c'est-à-dire 10 milliards, pour couvrir ses propres dépenses, tandis que le peuple iraqien n'a obtenu que 7,8 milliards de dollars, en trois années et 9 mois, soit 25 % du montant, ce qui fait 7 dollars par mois par individu. C'est pourquoi je nomme souvent le programme « pétrole contre dépenses de l'Onu ». Le reste inclut notamment les compensations de la guerre du Golfe. Mais ce qui me dérange le plus, c'est le gaspillage de l'organisation.

Le chef de la Commission de contrôle et de vérification de l'Onu (Unmovic) a déclaré que la délégation serait prête à partir pour l'Iraq début septembre ; quelle sera l'attitude iraqienne envers la commission ?

Qu'ils restent là où ils sont ! L'Iraq refuse de permettre aux inspecteurs de fouiller davantage sur son territoire. Notre pays refuse de se soumettre à la résolution 1 248. Car cette résolution empêche le peuple iraqien de mener une vie humaine en prolongeant l'embargo, contrairement à la clause 22 de la résolution 687 de l'Onu. Celle-ci stipule la levée de l'embargo sous deux conditions : que l'Iraq paye des compensations pour la guerre du Golfe et que l'Iraq soit exempt de toute arme de destruction massive. Pour la première condition, c'est l'Onu même qui retranche régulièrement le montant des compensations de nos revenus pétroliers. Et pour la seconde, il a été déclaré il y a bien longtemps, par Scott Rider, qui était responsable de la destruction des armes iraqiennes, que l'Iraq ne possédait plus d'armes de destruction massive depuis 1994. Ceci signifie que la commission précédente n'avait plus rien à faire en Iraq, mais qu'elle restait pour des raisons politiques. Ce qui veut dire que la commission est restée sur le territoire iraqien dans le but de donner un prétexte au prolongement de l'embargo, et ainsi menacer la stabilité de l'Iraq. Actuellement, nous ne savons pas ce qui va nous arriver avec cette dernière résolution injuste, laquelle s'oppose à l'autre permettant la levée de l'embargo. Ce qui fait que les exportations et les importations iraqiennes demeurent sous surveillance rigide, pour un temps indéterminé.

Comment percevez-vous l'augmentation actuelle des cours du pétrole ?

Bien entendu, nos exportations pétrolières en sont affectées. Les revenus suivent la même courbe ascendante que les prix du brut. Depuis 1986 et pendant une dizaine d'années, les pays consommateurs de pétrole ont acheté leur pétrole à un prix très bas, qui était descendu jusqu'à 10 dollars le baril, et même 8 ou 7 dollars. Et les pays exportateurs n'ont pas défendu leur position, ni leurs intérêts. Ils n'ont même pas accusé l'Arabie saoudite, qui en fin de compte allait contre les intérêts de son peuple, en dépassant son quota de production et en inondant le marché. Aujourd'hui, les prix sont à la hausse, mais encore moins élevés que les niveaux du début des années 1980 et de la deuxième moitié des années 1970, mais les pays industrialisés sont sens dessus dessous et essayent actuellement d'exercer des pressions énormes, sur l'Arabie saoudite particulièrement, et sur les autres pays producteurs en général pour baisser les prix. Bien que ces pays industrialisés aient profité des cours ces derniers jours, les prix de leurs biens industriels n'ont cessé d'augmenter. Cette attitude reflète qu'ils ne s'intéressent qu'aux intérêts de leur industrie et non pas aux cours.

Mais l'Iraq possède-t-il des cartes à manipuler sur le marché du brut ?

Pour les raisons que je viens d'évoquer, l'Iraq défend fortement la hausse des prix. Et bien sûr, il possède le pouvoir de perturber les marchés. Imaginez que l'Iraq décide aujourd'hui d'arrêter ses exportations, cela élèvera évidemment encore davantage les prix. Il ne faut pas oublier le poids de l'Iraq. Il possède les secondes plus grandes réserves pétrolières du monde, et même peut-être les premières si l'on prend en compte les dernières découvertes en cours, dont les recherches complètes se termineront en 2003. C'est pour cela que nous cherchons une coordination avec les autres pays exportateurs pour unifier nos points de vue et défendre nos intérêts.

Entretien réalisé par Salma Hussein

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