En primeur, avant publication sur mon site (à 10 minutes près), mon commentaire sur le rapport Delaubier (dans lequel je parle de la PMEV, mais à la fin):
COMMENTAIRES SUR LE RAPPORT DELAUBIER SUR LA SCOLARISATION DES ENFANTS INTELLECTUELLEMENT PRECOCES La commission ministérielle nommée par le Ministre de l’Education Nationale, qui a travaillé depuis environ un an sur la scolarisation des enfants dits « précoces », vient de rendre ses conclusions pour proposer au Ministre les mesures à prendre pour cette catégorie d’enfants. La première chose à noter est qu’il s’agit d’une première en France, et que ce travail a représenté, pour certaines associations, un aboutissement : la reconnaissance de cette catégorie d’enfants était la raison de leur création et de leur existence même. N’en déplaise aux esprits chagrins, on peut donc d’ores et déjà abandonner le discours qui a longtemps consisté à dire que l’Education Nationale ne ferait jamais rien dans ce domaine. La première difficulté abordée par ce rapport, que ceux qui ont étudié le problème connaissent tous, est de définir de qui l’on parle : enfants « précoces », « surdoués » ne sont que des artifices de vocabulaire qui ne recouvrent pas la réalité très diverse de cette catégorie d’enfants. Limiter la définition de ces enfants au seul Q.I est forcément réducteur, l’assimiler à un « âge mental » est une erreur technique, encore commise par certains psychologues. Le Q.I reste cependant pour l’instant le seul « instrument de mesure » éliminant toute subjectivité. Si l’on s’en tient à ce seul critère, il est intéressant de constater que la commission a choisi de placer la « barre » à 130, ce qui représente environ 2% de la population, soit environ 200 000 élèves en France. Il est bien précisé que cette délimitation est arbitraire et que la réalité est plus complexe. En ce qui me concerne, et je m’en expliquerai dans une prochaine étude de 225 pages que je viens de terminer, la définition qui me paraît la plus intéressante est celle de Joseph Renzulli, directeur du National Research Centre for Gifted and Talented aux USA qui donne, dans sa « Three rings conception of giftedness » le « surdouement » comme une caractéristique se situant au croisement de trois autres : les aptitudes (intellectuelles entre autres), la créativité, et la motivation, ce qui recoupe les caractéristiques définies par Ellen Winner : insistance à se débrouiller seul, rage de maîtriser et précocité. Il est donc vrai que la mesure du Q.I et les termes de « surdoués » et de « précoces » ne suffisent pas à définir cette catégorie d’enfants. Les termes « à Q.I élevé », « à haut potentiel » ont l’inconvénient de suggérer une supériorité. On parle dans les institutions internationales d’enfants « à besoins éducatifs particuliers », mais cette expression a l’inconvénient de masquer la notion de potentiel au profit d’une notion d’assistance à donner, ce qui n’est pas exactement de la même nature. Il serait donc, à mon avis, plus intéressant, pour intégrer le prise en compte de cette catégorie d’enfants très hétéroclite, de parler « d’enfants à potentiel(s) particulier(s) », ou « à besoins éducatifs particuliers », ce qui aurait pour conséquence immédiate de faciliter leur prise en charge par l’institution scolaire, par l’A.I.S par exemple. Accepter le terme « d’intellectuellement précoce » ne peut être qu’un pis-aller provisoire et la réflexion doit aboutir rapidement pour dissiper les ambiguïtés qui polluent idéologiquement ce problème. Il faut détruire le mythe de l’être supérieur pour construire une représentation d’enfant dans le besoin, sinon toutes les dérives sont possibles, ce que l’on peut constater dans certains écrits ou sur certains sites Internet. La deuxième difficulté est le manque de travaux réalisés en France sur ce sujet. Nous sortons, dans ce pays, d’une longue période de déni de l’existence de « surdoués » qui a paralysé la recherche jusqu’à ces dernières années, particulièrement dans le domaine pédagogique. Il est urgent d’accepter que des chercheurs étudient cette catégorie d’enfants, pour contribuer à détruire les fausses représentations et les mythes. Si l’on met en parallèle les revendications des associations (page 11) et les mesures préconisées par le rapport (pages 37 à 43), on retrouve exactement de part et d’autre les mêmes préoccupations, sauf dans les domaines ou des divisions existent entre associations (aménagement de la scolarité). Celles-ci auront donc du mal à dire que leurs revendications ne sont prises en compte. L’étude des difficultés de cette catégorie d’élèves met l’accent sur les problèmes d’inadaptation scolaire et sur leurs besoins : reconnaissance, prévention, motivation et équilibre. L’analyse de la situation internationale permet de montrer que les attitudes peuvent être très différentes selon les pays : soit s’attacher à valoriser un « gisement »disposant d’aptitudes exceptionnelles, soit le souci de préserver les droits de toute catégorie d’élèves quelle qu’elle soit, de donner à chacun le droit de s’épanouir et de développer ses potentialités, et/ou de réagir contre un échec scolaire apparaissant comme injustifié. Il apparaît également que toutes les organisations internationales reconnaissent les besoins éducatifs particuliers de cette catégorie d’enfants. La France a, jusqu’à ce jour, cru trouver une solution répondant aux besoins de toutes les catégories d’élèves en préconisant un enseignement différencié dans le cadre de la pédagogie par cycles, mise en route depuis 1992. Le principe d’un système résolument « intégrationniste » qui regroupe toutes les catégories d’élèves dans le même cursus quel que soit leur handicap ou leurs besoins particuliers, s’il est volontariste et humaniste, a du mal à se mettre en place concrètement. Cette mise en oeuvre reste encore à l’heure actuelle très dépendante de la bonne volonté des acteurs de terrain et on se demande s’il ne faudra pas attendre le départ à la retraite des enfants du « baby boom » d’après-guerre pour que les choses évoluent réellement. Les intentions sont donc très louables, mais on peut se demander si le système français a réellement les moyens de sa politique. « Mettre l’enfant au centre du système éducatif » relève bien de la réponse à des besoins individuels, mais comment atteindre cet idéal sans adjonction de moyens, par la seule mise à niveau des compétences des acteurs de terrain ? Travailler différemment, s’organiser différemment pour prendre en compte toutes les spécificités est une gageure dans des classe de 25 élèves, sans un ordinateur dans chaque classe, sans une B.C.D à disposition avec du personnel pour gérer l’activité, etc. (la liste des nécessités pourrait être longue). Qui plus est, les enfants à potentiels particuliers sont, pour l’instant, méconnus du système tout entier. Quant à l’aide des réseaux d’aide aux enfants en difficultés, elle est essentiellement centrée sur les enfants victimes de déficiences et sur les cas sociaux. Qu’un enfant dit « surdoué» puisse être en difficultés, surtout s’il appartient à une classe sociale non défavorisée, échappe encore à beaucoup de ces personnels et il sera difficile de changer leur façon de voir. Donc les propositions qui sont faites sont, certes, très généreuses mais vont demander un effort particulier dont on ne sait pas si le système est capable : Informer les enseignants, les psychologues, prévenir les difficultés en « détectant » les enfants à potentiels particuliers dès la Maternelle, ce qui veut dire former les enseignants de Maternelle. Comment ? Par qui ? A partir de quels apports théoriques ? La France n’a pas de chercheurs sur ce thème, à part Monsieur GRUBAR, qui a étudié le sommeil paradoxal de ces enfants. La recherche sur les besoins pédagogiques de ces enfants est inexistante à l’Université et dans les grands organismes nationaux comme l’INRP. Accueillir les familles, assurer un suivi suppose aussi une connaissance du problème. Quant aux solutions pédagogiques proposées - apporter une réponse aux difficultés, adapter le rythme d’apprentissage, développer les possibilités d’enrichissement, pratiquer une pédagogie innovante et différenciée - la difficulté de leur mise en œuvre relève, comme je l’ai dit plus haut, des compétences actuelles et de la bonne volonté des acteurs de terrain. Je pense donc que le rôle des associations, loin de diminuer, doit s’appuyer sur toutes ces résolutions pour exercer dès maintenant une pression très forte sur le terrain en s’appuyant sur les écoles où pratiquent des équipes motivées, que ce soit en matière d’accueil d’enfants « différents » ou de pédagogie individualisée, comme c’est le cas à Lyon. Ces écoles pourraient servir « d’écoles-ressources » destinées à accueillir et à former des enseignants, psychologues, rééducateurs. J’ai toujours été surpris de la motivation des gens qui ont des pratiques innovantes à faire partager leurs acquis : il y a là, sur le terrain, un véritable « gisement » inexploité. Cela n’exclut que les apports théoriques nécessaires soient dispensés par ailleurs, et des adultes peuvent même se les approprier eux-mêmes, mais il est dommage de se priver de la valeur de l’exemple : la Pédagogie de Maîtrise à Effet Vicariant, dont il est fait mention dans le rapport, comme « moyen de gérer l’hétérogénéité », en est un exemple saisissant puisqu’elle est fondée sur la valeur de l’exemple. En guise de conclusion, on peut être très satisfait de cette reconnaissance demandée par toutes les familles concernées, on ne peut qu’approuver les propositions qui sont faites au Ministre, mais il faut bien être conscient que ce n’est qu’un début et qu’il faudra encore beaucoup d’années de travail pour qu’une réelle évolution soit enregistrée sur le terrain. -------------- Profitez de l'offre spéciale Tiscali Liberty Surf ! 50% de temps en plus pendant 3 mois sur tous les forfaits Internet. http://register.libertysurf.fr/subscribe_fr/signup.php3 ----- Pour vous desabonner : ecrivez a : [EMAIL PROTECTED] Pour obtenir de l'aide : ecrivez a : [EMAIL PROTECTED]