> Le sodium n'a pas que des inconvénients, je te spoil un peu le bouquin
> sur Phénix (en attendant que tu le lise) mais grâce au sodium le BR
> est accessible et visitable lors de l'exploitation (contrairement aux
> REP) et permet de l'inspection en cours d'exploitation.

Vrai...

> On arrive très bien à faire de la tuyauterie fiable (à 155 bars) et
> isolée sur les REP, cette eau contient des éléments radioactifs, on
> n'a pas intérêt à y voir une fuite. Si le sodium remplace l'eau, les
> contraintes elles restent les mêmes.

Disons que du sodium d'un coté et de l'eau de l'autre, oui, ça ne
devrait pas arriver, mais si ça arrive... Il faudrait calculer l'énergie
dégagée par l'explosion... Ça a du être fait mais je ne suis pas
chimiste :()

> Tu pourras ainsi te faire ton avis.

Tendance à donner mon avis sur ce que je vois. Un livre, je le vois
comme de l'instruction...

> Ca c'est clair que c'est une industrie opaque. 

C'est un euphémisme.

> On est malheureusement dans une époque où une personne lambda se
> permet d'apporter son avis et son expertise sur un sujet qu'il ne
> maîtrise pas. Il n'y a plus de respect pour le technicien/expert et
> son avis/expertise est remise en cause. Les plateaux de TV sont
> remplis de ces experts.

C'est vrai.

> Sur le 2ème bouquin (pilotage REP), tous les chapitres sont bourrés de
> théorie, puis l'instrumentation des installations (la vraie vie)
> confirme la théorie. Donc on est capable d'expliquer ce qui se passe
> et de maîtriser les éléments de la centrale;
Sauf sur les surfaces de repose de la cuve (les "pieds" de cuve), là
c'est mort pour la vie de la centrale et donc de la cuve. Il y a des
endroits où "on ne sait pas". Et d'autres devenus quasiment
inaccessibles (trop chaud, suite à des "diffusions d'aérosols non
contrôlées" - en clair c'est resté bien radioactif malgré la
décontamination, et ce pour la vie de la centrale, les intérieurs de BR
ont des coins comme ça...)
Ce qu'ils font généralement... c'est de moins charger (en combustible)
les endroits "compliqués".
Mais le MOX, c'est très énergétique. Alors ils en tiennent compte aussi.

> * c'est une industrie très contrôlée;

Oui et globalement, des gammes techniques à la conscience pro des
intervenants, ça pourrait être pire. Mais les câbles et boites de
raccordement sous scellés des instruments du "zinzin" (surnom de l'ASN),
parfois, ça se débranche ou s'arrache... Des accidents bien sûr. <- ne
pas rougir.

> En voyant le retard de l'EPR et du réacteur Jules Horowitz montrent
> qu'on a placé le curseur de la sécurité bien avant le curseur de la
> rentabilité économique et que malgré les retards et le surcoût on n'a
> pas changé les plans pour finir au plus vite, le curseur de la
> sécurité n'a semble-t'il pas bougé à la baisse.

En fait, je parle pour Flamanville 3 (l'EPR), on ne sais plus construire
une centrale nucléaire, ceux qui savaient sont en retraite ou morts et
on n'a plus d'ouvriers, plus de soudeurs nucléaires, etc... Il faut tout
reprendre à zéro et reconstruire la filière. C'est avant tout un
problème humain.

Il y a un an ou deux, je ne sais plus, il ont du remplacer du matos neuf
et pourri par 10 ans de corrosion saline, à cause des retards. Sauf que
ces matos devaient faire la vie de la centrale, et le bâtiment avait été
construit après. Donc d'abord démolir le bâtiment neuf, virer le matos
neuf-pourri, en remettre un neuf-neuf, reconstruire un bâtiment neuf.

C'est comme le couvercle de cuve également pourri (carbone), si un jour
elle démarre, elle sera limitée à 1000 ou 1200 MW (je ne sais plus). et
à la prochaine décennale, le couvercle de cuve sera changé et on
espérera les 1600 MW... bonjour la perte d'exploitation. Pendant ce
temps là, il me semble que le dernier palier de l'ancienne génération
(Civaux) devait être dans les 1460 MW...

> Je m'inquiéterais le jour où on sacrifiera la sûreté (au bénéfice
> d'autre chose) mais je pense que les salariés du nucléaire se
> rebelleront les premiers car ils seront les premiers concernés.

Depuis les années 80, un sous-prolétariat du nucléaire vit (en partie)
en caravane à l'année, le long des "arrêts de tranche", ce sont les sous
traitants de rang deux, les petites mains essentielles... Il reste que
les riches sous-traitants dans les Novotels du coin... Ça n'a pas
changé, ça a empiré. Au début EDF c'était : quelque soit le prix, pour
la sécu, on paye. Depuis 25 ans c'est plus ça. Je me garderais
d'expliquer pourquoi. J'ai juste constaté. Il y a des enquêtes qui te
confirmeront mes dires, mais elles sont très rares.

Tout ce que je décris ne date pas d'hier. C'est une immense entreprise,
technique et humaine, très encadrée, avec des dizaines de milliers de
procédures. On pourrait en écrire à l'infini.

-- 
Stéphane Rivière
Ile d'Oléron - France


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