Bonjour,


Comme annoncé (avec un peu de retard toutefois, mais les questions étaient
nombreuses et l’actualité riche), ci-dessous qques éléments de réponse à
des questions soulevées concernant la récente décision de l’ARCEP sur la
collecte d’informations sur l’interconnexion.



J’en profite pour vous signaler la consultation organisée par l’Autorité de
la Concurrence sur un sujet très proche, auquel certains d’entre vous
pourront être intéressés à répondre :

http://www.autoritedelaconcurrence.fr/user/standard.php?id_rub=435&id_article=1834



Cordialement,



Guillaume Mellier

ARCEP

______________



Texte complet de la décision ARCEP :
http://www.arcep.fr/uploads/tx_gsavis/12-0366.pdf





== QUELS SONT LES OBJECTIFS ? ==



1°) Cette décision n’est en aucun cas liée à un quelconque projet de
taxation



Face au débat sur l’éventualité d’une taxe, qui a été assez soutenu sur la
liste ce week-end, il me semble utile de redire que cette décision n’est en
aucun cas liée à un quelconque projet de taxation. L’ARCEP est le
régulateur sectoriel des communications électroniques. Autorité
administrative indépendante (cette indépendance est garantie par les
directives européennes et par la loi), elle n’a aucune compétence pour
fixer ou contrôler les taxes. Par ailleurs, les informations qu’elle
collecte ne peuvent en aucune manière être utilisées par les services
fiscaux. Comme elle a su le faire sur les autres marchés qu’elle suit,
l’ARCEP mettra en place un cadre de traitement de ces informations adapté à
la protection du secret des affaires. Les données individuelles ne seront
pas accessibles à des tiers.



2°) Les données collectées visent à mieux connaître le marché et en
particulier suivre certaines évolutions actuelles



L’ARCEP a fait le constat du besoin de porter une attention plus
particulière à ce marché. A la fois parce que certaines tendances nous
interrogent (polarisation croissante des flux, renforcement du pouvoir de
marché des FAI, débats autour d’une « TA data »), et parce que nous sommes
interpellés ou saisis (officieusement à ce stade) par certains acteurs à
l’encontre de pratiques d’autres acteurs. Des saisines formelles ne sont
pas à exclure, que l’ARCEP est alors tenue de trancher. L’ARCEP a par
ailleurs déjà dû fournir un avis à l’Autorité de la Concurrence dans la
saisine de Cogent à l’encontre de France Télécom. Elle a donc le souci dans
de tels cas de se prononcer de manière équitable et proportionnée au regard
de la manière dont fonctionne ce marché, ce qui implique de mieux le
connaître.



L’ARCEP a donc engagé des démarches en ce sens l’an dernier, notamment au
travers d’une série d’entretiens avec des acteurs du marché (une quinzaine
au S2 2011) et d’un workshop organisé au sein du BEREC (organe des
régulateurs européens) en lien avec l’OCDE en novembre (
http://internetthought.blogspot.fr/2011/12/slides-available-berec-expert-workshop.html
).



Au-delà de ces éléments qualitatifs, sur lesquels les échanges doivent se
poursuivre, le constat a été fait du besoin complémentaire d’un suivi plus
quantitatif, visant à mieux suivre l’évolution globale du marché et
permettre de replacer des pratiques dans leur environnement d’ensemble. Ces
informations ne sont pas disponibles publiquement aujourd’hui, d’où le
besoin d’une collecte spécifique. Qques exemples d’éléments recherchés au
travers de ce suivi : combien pèsent les flux  échangés au global ? quelle
est leur évolution dans le temps ? quelle est la proportion de liens en
peering vs transit ? quelle est la proportion du trafic échangée en peering
vs transit ? comment évolue-t-elle dans le temps ? comment se répartit-elle
selon la taille des acteurs ? quel est le niveau de concentration /
déconcentration du trafic ? comment évolue-t-il dans le temps ? quelle est
la disparité des tarifs selon la taille des acteurs et les capacités
installées ? quelle est la proportion de peering payant ? etc.



En tout état de cause, l’ARCEP n’a pas aujourd’hui l’intention de réguler
ce marché de l’interconnexion IP. Vu les spéculations qui ont pu naître
autour de cette hypothèse, l’ARCEP a d’ailleurs pris le parti d’indiquer
cela explicitement dans sa décision de collecte d’informations : « la
situation actuellement observée sur les marchés de l’interconnexion et
l’acheminement de données ne semble pas nécessiter, à ce stade, la mise en
place d’une régulation ».



3°) D’autres actions sont mises en œuvre pour avoir une vision plus large
du fonctionnement de l’accès à l’internet, qui ne se résume pas à
l’interconnexion



Certains ont pu souligner que des informations quantitatives sur les
interconnexions, sans savoir ce qui se passe derrière, n’ont aucune
utilité. Cette collecte d’informations ne vise pas à tout traiter,
simplement à mieux connaître le marché de l’interconnexion. La qualité de
bout en bout est par exemple bien entendu un paramètre important. C’est
pour cela que l’ARCEP mène en parallèle un chantier visant à définir et
mettre en place un dispositif de mesure périodique d’indicateurs de qualité
de service des offres d’accès à l’internet. Je vous renvoie pour cela à la
consultation publique lancée en décembre :
http://www.arcep.fr/uploads/tx_gspublication/consult-qs-acces-internet-fixe-dec2011.pdf





== QUI EST CONCERNE ? ==



Seuls sont concernés par la collecte semestrielle d’information les
personnes : (i) qui ont une activité d’opérateur en France (et sont donc à
ce titre tenus de se déclarer auprès de l’ARCEP), (ii) qui disposent d’un
AS, (iii) et qui sont interconnectés avec au moins deux autres AS. Tous les
détenteurs d’un AS ne sont donc pas concernés par la collecte semestrielle.



En effet, un acteur disposant d’un AS ne doit pas nécessairement être
déclaré auprès de l’ARCEP. La déclaration auprès de l’ARCEP est obligatoire
pour les personnes physiques ou morales qui « exploitent des réseaux
ouverts au public (dont tout ou partie des installations est située en
France) ou fournissent au public (en France) des services de communications
électroniques » (art. L33-1), ce qui est la définition d’ « opérateur »
(art. L32).



Un réseau est « ouvert au public » lorsqu’il est utilisé (ou a vocation à
être utilisé) pour la fourniture au public (à un particulier, à une
entreprise) d’une offre de services de communications électroniques. Les
personnes disposant de leur propre réseau mais qui n’est utilisé que pour
leurs besoins propres ne sont pas concernés, dans la mesure où leur réseau
n’est accessible qu’à un groupe fermé d’utilisateur et n’est donc pas
ouvert au public.



Pour mémoire, la liste des opérateurs déclarés auprès de l’ARCEP est
disponible sur le site web de l’Autorité :
http://www.arcep.fr/index.php?id=9320.



Les autres opérateurs (notamment les opérateurs internationaux qui n’ont
pas à être déclarés auprès de l’ARCEP) ainsi que les fournisseurs de
services en ligne ne sont pas concernés par la collecte périodique
d’information. Certains (ceux disposant d’une interconnexion directe avec
un opérateur actif sur le territoire français) pourront néanmoins être
éventuellement interrogés ponctuellement.



En pratique, l’ARCEP ne prévoit d’interroger ponctuellement certains de ces
acteurs qu’une fois reçues les informations des opérateurs tenus de se
déclarer auprès d’elle afin de compléter ou de préciser ce premier retour
d’informations. Comme elle a pu l’indiquer dans sa décision, l’ARCEP
prévoit en outre d’ajuster le dispositif, en fonction des conclusions
tirées du ou des premier(s) retour(s).





== QUELLES SONT EXACTEMENT LES INFORMATIONS DEMANDEES ? ==



La collecte d’information concerne les principaux accords individuels (cf.
annexe à la décision). Cela recouvre donc les principaux accords de transit
et de peering. Cela comprend donc les « peering privés » (capacité dédiée),
qu’ils soient mis en place dans un IX ou dans d’autres points
d’interconnexion.



S’agissant du « peering public » au niveau des IX (capacité partagée), sont
demandés la capacité et les flux (entrants/sortants) échangés « avec
l’IX », c’est-à-dire avec ses membres pris dans leur ensemble. Pour
répondre à une question posée, il n’est pas demandé de détailler, AS par
AS, le trafic échangé au niveau de chaque IX en peering public. On est
plutôt dans une logique « par port ». La fourniture, en complément des
informations globales sur le peering public, de la simple liste des AS
effectivement interconnectés (avec qui une session est ouverte) serait
néanmoins appréciée.



Sont demandés pour chaque AS les 20 liens les plus importants, et ceux
au-delà qui dépasseraient encore 1Gbit/s. Ces paramètres ont été ajustés
par rapport au projet mis en consultation publique au mois de décembre, sur
la base notamment des réponses reçues. Si besoin, ils pourront être adaptés
à l’occasion d’une révision de la décision.



Suite à une question posée, je précise qu’il n’y a aucune difficulté à ce
que les réponses soient envoyées dans un format de tableur autre que xls
(ods notamment)(tant que cela reste un format suffisamment standard).
L’ARCEP pourra mettre en ligne une version ODS du questionnaire.





== COMMENT LA DECISION A ETE ELABOREE ==



Certains ont pu s’étonner du délai entre la fin de la consultation publique
et l’adoption de la décision (du 17 février au 29 mars). Hommage à une
certaine efficacité de l’ARCEP ?



Plus sérieusement, le principe de cette collecte a été annoncé il y a 18
mois, en septembre 2010. Un test a eu lieu en 2011 auprès d’une grosse
dizaine d’opérateurs de différentes tailles. La consultation publique sur
le projet de décision issu de ce test a été ouverte pendant deux mois, ce
qui est une durée volontairement plus longue que la pratique habituelle qui
est de 4 semaines. Une quinzaine de réponses a été reçue, dont le contenu a
été analysé et pris en compte (ASIC, AFUTT, AT&T, Bouygues Telecom, Cable &
Wireless, Cogent Communications, Dailymotion, France Télécom Orange, Free,
Google, LINX, SFR, Teliasonera, Verizon France, VON Europe).



Sur le fait que l’ « avis de FrNOG » n’ait pas été pris en compte, je dois
dire que nous n’avons pas reçu de contribution –formelle ou informelle – ni
de FrNOG, ni à titre individuel de ses membres actifs. Ce que d’ailleurs
nous regrettons. Les consultations publiques sont le lieu de débat ouvert
et contradictoire sur les projets de décision. L’ARCEP y est à la fois
tenue par la loi dans certains cas, mais le pratique également volontiers
dans d’autres cas où elle n’y est pas tenue, car la concertation et le
contradictoire aboutissent à des décisions plus pertinentes et
proportionnées. Cela suppose cependant que les acteurs fassent part de leur
opinion, ce qui peut passer par un simple mail à l’adresse électronique
fournie pour les réponses.





== DISCUSSIONS ET ECHANGES ==



Les services de l’ARCEP sont toujours preneurs d’échanges avec les acteurs
du secteur. Suite à une proposition qui a été faite, nous viendrions très
volontiers faire une présentation de la démarche de l’ARCEP lors de la
prochaine réunion du FrNOG. Je n’ai cependant pas l’impression que la date
en ait déjà été fixée ?



Venir au LINX en mai doit également être possible. C’est néanmoins moins
évident pour le RIPE et le NANOG.



On peut également tout à fait monter une réunion multilatérale à l’ARCEP,
ce qui permettra une discussion plus approfondie avec un nombre plus
important de personnes côté régulateur.



J’en profite enfin pour vous signaler qu’un nouveau workshop « BEREC-OECD »
devrait être monté pour le mois de juin.


A bientôt j'espère pour des échanges sur ces sujets,

 (et/ou d'autres réponses sur la liste)

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Liste de diffusion du FRnOG
http://www.frnog.org/

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