Le principe dateliers permanents est de réserver un emplacement de la classe pour une activité précise, autour dun matériel spécifique.
Plusieurs difficultés sont rencontrées dans la mise en place de ces ateliers permanents :
Certains enfants naviguent dateliers en ateliers sans approfondir ou terminer leur activité : cest ce quon peut appeler leffet zapping.
Quapprennent les enfants en répétant des activités sans souci dévolution ?
Les enfants restent dans une béatitude (Cest super ce que tu fais), sans renchérissement sur le produit réalisé. Ils pataugent dans la zone proximale de sous-développement. Les ateliers permanents ne sont-ils pas des niches pour ceux qui veulent en faire le moins?
On ne mesure pas ce qui se passe dans leur tête, on ne contrôle pratiquement rien..
Les enfants qui viennent à lécole peuvent-ils le faire tous seuls ?
Il semble y avoir confusion entre atelier et travail individualisé : les ateliers permanents correspondent plus à une forme dactivité quà une modalité dorganisation du travail. Bien que la participation à un atelier ne puisse senvisager de manière collective, tout ce qui est du ressort du travail individualisé ne se traduit pas nécessairement au sein dun atelier.
Lorganisation dateliers permanents dans une classe, bien que dépassant la seule intention occupationnelle, sappuie sur une conception particulière de lacte dapprendre : apprendre ne se définit plus seulement sur la médiation de ladulte mais dépend également des connexions qui se créent ou sintensifient lorsque lenfant en activité fait fonctionner son intellect.
Les ateliers permanents ne peuvent pas être un créneau dans la journée, dune part parce que cela réduirait le caractère de permanence de ces ateliers, dautre part parce que cela engendre une rupture trop nette dans la dynamique de travail des enfants : les poursuites et suivis des projets deviennent plus difficiles, ce qui pourrait entraîner les phénomènes de zapping dont nous parlions avant.
Ce qui a pu permettre un fonctionnement en ateliers permanents différent des plages horaires prévues à cet effet est le caractère prioritaire de la prise en compte de linformation entrant dans la classe. Les ateliers ninterviennent plus comme des supports à activités décontextualisées mais comme des sources doutils aidant à la réalisation de projets personnels : on ne se rend plus en atelier parce que cest le moment mais plutôt parce que sy trouve un outil qui va maider à écrire mon texte, décorer mon affiche, compléter mes recherches
Il a été observé que ce sont souvent les enfants que lon « pousse » le moins qui réussissent le plus et à contrario ceux que lon contraint le plus qui ne mobilisent quune part très restreinte de leurs capacités. Cette idée rappelle quelque peu le témoignage de Neill avec des enfants qui nayant pas mis le pied dans la salle de classe sur plusieurs années se mettent un beau jour à rattraper leur retard avec fulgurance. Il est à noter que le temps dapprentissages dont disposaient ces enfants et leurs responsables adultes est souvent bien plus conséquent que celui que lon nous permet.
Néanmoins, cette observation confère bien aux ateliers permanents dans une classe une place forte quant aux apprentissages quils vont susciter. La nature de ces apprentissages dépendra bien évidemment de la nature des outils mis à disposition et entretenus par lenseignant.
Si ce que lon recherche est donc lactivité de lenfant, il apparaît pédagogiquement opportun de tenter dadopter la stratégie de sintéresser en priorité aux enfants qui sont en activité, quitte à donner moins de temps à ceux qui ne le sont pas encore. Outre le caractère de médiatisation des efforts fournis par certains, cela dynamise les projets en cours de réalisation parce que cette aide contribue à débloquer les résistances et à orienter les recherches vers davantage de richesse.
Par exemple pour lapprentissage de la grammaire ou de la conjugaison, cette stratégie peut sillustrer par une information de mise à disposition de lenseignant pendant une période définie, ce qui diffère profondément dune coercition faite à des enfants qui rechignent à sentraîner dans ces domaines.
Terminons ce CR par la phrase de Pierre : « On travaille souvent dans le coup de pied au cul », pas celui de lenseignant mais celui que lon se donne pour réussir les défis que lon sest donnés ou respecter les contraintes qui nous sont extérieures.